Le jeu du pendu
>>> Sept et Lartizan
         Imaginez vous en grand goûteur de vin. Un oenologue style Patrick Léon. Vous êtes là, et devant vous, dressés sur une table recouverte d’une nappe blanche, 5 bouteilles des plus grands crûs de la nation hexagonale. Loin de la grande distribution mollassonne, fade et sans aucune personnalité. Loin des produits de consommation courante, où l’on ne retient plus que les effets néfastes, à défaut d’un goût unique, d’une robe rare, ou une mise en bouteille qui affiche votre date de naissance.
Non, ici on parle qualité. Un vin que l’on ose même pas appeler « produit » tellement ça semblerait vulgaire. Le prix le plus bas de cette rangée de cinq plomberait les comptes de votre famille sur 5 générations ! Mais pourquoi parler de prix quand vous avez en face de vous ce qui fera réellement naître vos papilles, qui fera basculer vos émotions dans un vide, une neutralité qui éclipsera tous ces éléments parasites qui font que chaque goût, chaque forme, chaque ressenti se retrouvent faussé depuis votre naissance.
A chaque gorgée, vous vous émerveillez, retrouvant le vrai plaisir, jurant de ne plus jamais goûter de ces vins hasardeux, fait pour oublier, et non pour apprendre. Puis vient la dernière bouteille, soit disant plus réputée, plus fine, une catégorie encore au dessus. Face au verre, vous vous préparez à l’unique gorgée que vous impose votre métier. Et là, votre vie s’arrête, le silence se fait, et une question vient vous gifler : «Ai-je vécu avant ? » .

Voilà un résumé de mon avis sur Monsieur Le Sept ; Et de son dernier album en collaboration avec Lartizan.
Un jour j’ai découvert cet artiste, à travers le titre « con citoyen ». Je découvrais un flow et une voix reconnaissable dès les premières mesures. C’est alors que j’ai cherché des infos, et j’ai pu télécharger « Amnésie ». Oui je le dis honnêtement, je l’ai télécharger, car je n’ai pas la chance d’un Miles qui trouve cette perle rare dans les bacs d’un vieux disquaire d’occasions ! Et le tout pour pas plus de 5 Euros !
Je reviens donc sur ce premier album du rappeur de Montreuil. Et j’ai pris une vraie claque quand j’ai entendu cet album. Surtout au niveau lyrics, car j’avoue que les instrus me plaisaient, mais elles ne me transportaient pas non plus. Et puis une question m’est venu à l’esprit : « Sept serait il le meilleur lyriciste que le rap Français ai connu ? ». Oui ça reste subjectif, mais bon, quand je regarde dans les MC’s que je connais celui qui aligne la meilleure synthèse Fond-Forme ; il est le premier, désolé ! De plus, il a la touche d’humilité qui évite de le placer au rang d’inaccessible artiste. Je sais ce que je raconte, j’ai embarqué Sept dans une soirée mac do-nip tuck alors qu’on ne s’était quasiment jamais parler. Sauf deux trois commentaires sur Myspace. Je n’ai pas fait l’interview prévu…..il ne m’en a pas tenu rigueur, et depuis j’ai quand même réparé cette erreur. Trouvez moi un bon rappeur avec son statut (quand même) qui acceptent ce genre de choses ! (Big up au passage !)
Et puis, pour finir avec « Amnésie », et prouver que Sept s’il n’est pas le meilleur, il n’en est vraiment pas loin, il y a un couplet. LE couplet qui tue. Rageur, profond, direct, avec toujours ce flow énorme, celui de "pièces à convictions", le second couplet. Ecoutez, vous verrez.
Alors si vous doutez encore, je peux commencer ma chronique…enfin !
« Le jeu du pendu » se sera fait attendre. Comme tout les bons albums, il aura été mainte et mainte fois retardé, mais finalement, il a vu le jour. Déjà, la première évolution que je note, ce sont les instru. Bien meilleurs que celles d’ « Amnésie ». Lartizan nous gratifie de pures merveilles, tantôt péchues (« Karaoké Pirate », « Désintégration », « Tu tues », et j’en passe…), tantôt sombres («Diogène », « Lame soeur », « Je ne suis pas seul »…) , et certaines sombres et lourdes (« Un seul principe », « Le retour des crevards », « système métrique »…). Honnêtement, toutes les instru sont bonnes, vraiment. Si je voulais être tatillon, je dirais juste que celle dont j’accroche le moins, c’est « seigneurs de l’underground ». Mais en aucun cas je ne pourrais dire qu’elle est mauvaise. Ca serait vraiment être de mauvaise foi. Donc sur ce point là, rien à redire, le travail est fait, et bien fait !
Et le reste alors. Pour être sincère, c’est du bonheur. Même si cela paraissait impossible, on a franchit un cap. Le Sept a encore travaillé sa plume, le flow est encore plus poussé, mais surtout, il a ciblé ses thématiques. Plus de lyrics qui partent un peu dans tout les sens, non, maintenant, on se fixe sun sujet et on s’y tient. Donc on passe par la misère d’un SDF, la branlette sur une instru magique, jazzy ou soul, enfin moi j’adore ! On aura droit à quelques mesures sur les embrouilles qui peuvent mal tournées, sans qu’on en connaissent les raisons, l’amour, et pleins d’autres sujets.
Et ce choix de cibler ses lyrics, réduit le nombre de lignes écrites. Logique. Voilà le seul point où on pourrait se plaindre…certains morceaux nous semblent bien trop court ! Mais c’est comme toutes les bonnes choses, elles sont rares, et cela nous permet de les apprécier à leur juste valeur. Si vous appréciez Sept, vous savez ce que c’est d’attendre longtemps un nouveau morceau, et quand vous en avez une vingtaine sous la main, vous êtes ravi. Et sur les premières mesures d’une instru efficace (« Le retour des crevards »), le timbre grave d’Hadès vient mettre fin à des années d’attente, vous savourez, comme Patrick Léon savoure un vin d’exception.
Donc il est de retour, accompagné d’un putain de beatmaker, la magie opère directement. On enchaîne avec un thème connu, le rap, enfin surtout la réussite dans le rap (« les lois de la gravité »). L’amitié qui peut se retrouver faussé, les faux discours, le formatage…bref tout ce que l’objectif de vendre peut changer chez une personne. Au bout de deux morceaux on constate bien que Sept à évolué dans l’écriture, encore plus torturé, plus efficace. Mais si on veut du flow, on va en prendre un tsunami de phases de première classe, ou plutôt de classe A ! Ce titre est incompréhensible dès la première écoute, on se dit automatiquement qu'il dit n’importe quoi. Mais non en fait…pas étonnant. Mais dur de tout capter, faut l’écouter plusieurs fois. Un bon délire, fallait le tenter, Sept l’a fait !
On parlait durant l’interview de la carapace que l’on était obligé de se faire, une façon de se protéger de la misère des autres. Dans un scénario, notre MC de première classe se fond dans la peau d’un SDF, racontant son passé, vécu ou non, et sa condition actuelle. Le tout sur une instru à la fois mélancolique, mais qui garde le recul qu’a la plume de Sept sur le thème. Je ne suis pas clair…vous n’avez qu’à l’écouter! DJ Banal vient se poser en featuring pour quelques scratch bien balaises. Une fois de plus, pousser le volume car les kicks sont présent et les basses adorent ! Un couplet bien rageur et vous obtenez « Désintégration ».
Puis forcément, il nous fallait au moins une fois le tandem des faux soulbrothers ! Le gaulois et le polak, le chat et le corbak ! Mister S.O.K.L.A.K et sa gouaille (yo Phonky ;) !) vient aligner de bonnes punchlines (« Mc tu te bornes à l’égotrip/ Va te faire enlever 3 côtes tu pourras t’auto sucer la bite ! ») dans un trip bien prenant. Aux antipodes des pures égotrip de plus en plus à la mode. Souvent on retrouve un morceau sur les femmes, ou sur l’amour d’une manière général. Sept deviendrait-il conventionnel…merde !! Non, je ne pense pas. C’est juste une volonté, un petit saxo sur une instru à la fois dramatique et timide, et on obtient la déclaration d’amour du jeu du pendu (« Lame soeur »). Conventionnel je disais ? J’ai rajouter le « non » dernière, j’ai bien fait. Faire un morceau si bien écrit et prenant, et enchaîner ensuite avec du « sexe en K7 » racontant des moments que nous avons tous vécu nous les hommes…enfin nous surtout quand nous étions ados. Et il y a une chose que je qualifie contradictoire. Thème léger, on peut se contenter d’une prod légère également. Ah elle est légère celle-ci, mais le coté jazzy, les petits samples qui la compose sont tout simplement magnifique. J’adore ce type d’instru. Félicitation à Lartiz’ !
Puis on revient au rap, enfin à la musique. Après une interlude plus que parlante sur la grande distribution, on enchaîne avec un des trois morceaux qui prouvent que Sept est le meilleur. Le flow est unique, impossible de faire mieux sans occulter du fond, et là Sept est en plein dedans (« Les pros électronisent leur beat/ Et sectorisent leur feat/ Vectorisent leur street/ Préconisent leur hits/ Démolissent le mythe… ») . Respect. Petite taillade contre Diam’s, quoi qu’au final elle représente beaucoup de monde. Je pense que beaucoup de MC’s sont visés dans ce petit sample de « la boulette ».
Cinq featuring dans cet album, trois MC’s (Soklak, Faro & Iris), et deux DJ’s (Banal & Skeeze). « Seigneurs de l’underground » est une petite ode aux rappeurs US, pseudos traduit en français ou simplement déformés, on les reconnaît pourtant tous. Enfin presque pour ma part, n’étant pas incollable sur le rap outre atlantique. S’enchaînent ensuite plusieurs thèmes, du featuring avec Faro (« Correspondance ») qui nous montre combien Sept est un siffleur de première classe lol. Puis ce morceaux un peu extra terrestre…assez court, sur un son bien funky (« Karaoké pirate »). Excellent passage qui ne vous fera pas bouger que la tête. A passer en boucle le matin, ça réveille sec !
Iris répond présent sur un couplet, digne de son talent. Sa voix posée, toujours calme, juste, précise. Le morceaux « Je ne suis pas seul », sombre, avec ces petites reprises de séances collectives. Et il nous reste 5 pistes…dont une interlude (« 22h17 la villette ») et une outro…qui ne figure pas sur la cover. On l’appellera « Dédicaces » ! Nous sommes donc en présence du titre de l’album, « memento mori », et « Système métrique ».
Le premier est une nouvelle fois sur l’humain. L’amitié, les rapports humains quoi. Beat lent, un peu nostalgique, quelques scratch bien placé. Et du Sept égale à lui même. « Mémento Mori », si vous ne le connaissez pas, c’est que vous n’avez pas jeté une oreille sur le myspace de Lartizan, et même sur celui de Miles ou le mien (bon la je vous pardonne, je comprends…). Le Sept s’étale sur une embrouille dont lui-même ignore la raison, et qui finit très mal. On nous a tuer Sept ! Enfoirés ! Puis il y a ce dernier titre…enfin c’est la piste 16 mais je voulais le garder pour la fin. « Système métrique » est le second morceau qui vous prouvera qu’Hadès est bel et bien LE meilleur rappeur. Encore des phases de dingues, débitées avec facilité, et qui vous assomme au final. Une prod bien fat, qui doit mettre le feu en live, avec ses bonnes basses. Une instru conquérante, voilà !
Voilà pour une description des différents morceaux de cet album unique. Inutile de vous préciser que cet album est la sortie de 2008. Enorme, magique… Rien à dire de mal. Et ce n’est pas qu’un avis purement subjectif, vraiment. Il y a du taf, et du bon taf. On referme, ou on réécoute si on a le courage de se reprendre de suite des gifles. Mais ce n’est pas le courage qui vous fera revenir, mais l’addiction !
J’entends déjà Patrick Léon écouter cet album et se dire : « Ai-je vécu avant ? ».

PS : Je fuck toujours l’alcool, c’était pour le délire !




Sept et Lartizan
Novembre 2008

Chronique de Taiji
note : 20/20

01-Le retour des crevards
02-Les lois de la gravité
03-Classe A
04-Diogère
05-Désintégration (feat Dj Banal)
06-Tu tues (feat Soklak)
07-Lame s½ur
08-Le sexe en k7
09-l’appât (skit)
10-Un seul principe
11-Seigneurs de l’underground (feat Dj Skeeze)
12-Correspondance (feat Faro)
13-Karaoké pirate
14-Je ne suis pas seul (feat Iris)
15-Le jeu du pendu
16-Système métrique
17-22h17 la villette (skit)
18-Memento Mori

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