Zone Sacrée
>>> POMERIUM PROD
         Que ne voilà-t-y pas une bonne surprise pour moi que l'écoute de ce skeud ! Je le trouvais propre et bien ficelé à 1ère écoute, aux suivantes aussi d'ailleurs, mais la révélation de la valeur de cet album m'est venue plus tard, lorsque je décidais de le chroniquer, ce qui m'amena à l'écouter vraiment sérieusement, attentive aux instrus comme aux paroles et aux flows. Y a pas à dire, le rap, ça ne s'écoute pas dans n'importe quelles conditions, ça se déguste, ça se savoure, ça s'étudie.
Alors de quoi est-il fait ce premier album ? D'une unité musicale paisible, posée, sans jamais devenir terne ou ennuyeuse, les cloches et clochettes récurrentes renforçant l'unité et donnant à l'ambiance générale un petit côté solennel, chevaleresque. Du rap classique (si je peux me permettre l'expression) (mais comme c'est ma chronique je peux ;), sobre, efficace. Et un album bien construit, aux titres introduit habilement tout du long par des samples des chevaliers du zodiaque (un régal :) (un exemple d'habilité : le skit de fin de Nuit blanche "Il est temps que tu regardes la réalité en face, nous vivons dans un monde cruel où nous ne pouvons compter que sur nous-même. Seule la force permet de survivre" qui annonce la track suivante Plus la force).
Les textes reprennent les idées exprimées dans leur présentation, sur leur site, et sur leur cover (un petit bijou de packaging ce digipack au graphisme soigné), à savoir cette zone sacrée du rap qu'ils ont le souhait de préserver, et donc, forcément, l'esprit qui va avec.
Titre de l'album, cette track à la boucle arabisante présente leur esprit ("Dans cette zone sacrée moi je traine ma semelle, y a trop de mecs qui simulent, trop de faux qui s'en mêlent. Le hip hop se sent mal Pomerium se crée pour que l'imposteur s'en aille") et les couplets bien définis permettent de bien percevoir les différents flows, idéal pour découvrir les différentes personnalités des MCs (sauf qu'à l'oreille, qui est qui ??).
Leur esprit et leur quotidien, leur philosophie, c'est tout cela qui nous est présenté sur cet opus : le syndrome de la nuit blanche ("la nuit porte mauvais conseil"), la dénonciation de l'injustice avec Le sourire aux lèvres dont l'instru paisible et la petite boucle légère n'atténuent pas les textes incisifs ("ne me demande pas ce que je compte faire quand un pédophile prend autant qu'un voleur de scooter" ; "le peuple docile dompté par l'insécurité, des proies trop faciles pour madame stupidité, la peine est sans appel, lutter est dérisoire, ceux qui enfreignent les règles sont ceux qui possèdent le pouvoir"), le sens à donner à la vie, avec L'Edifice dont les violons légers envoutent tandis que le refrain pénètre le coeur de tout un chacun ("Flashback sur une pauvre rétrospective, pas assez d'actes louables pour paraitre respectables, rester stable et ça malgré les coups de vice, être capable d'amener sa pierre à l'édifice", "j'ai fait le bilan et ouvrir les yeux c'est le plus dur, lâchement j'ai commencé à plaindre ma sépulture") , une tite critique de ceux qui cède à la facilité de tout laisser tomber avec Plus la force ("On a peut-être plus de force mais on s'accroche"), un tit regard de leur horizon avec Code 187 ("lyriciste de l'illicite car dans la rue personne te félicite", "ma feuille est un filtre où je pose mes fractures et mes péripéties, la mort pour facture et la vie pour périple, chacun est acteur dans ce film pas terrible") dont le sample n'est pas sans me rappeler celui de strip tease et Parce que, au beat plus chaloupé que le violon nostalgique, et qui parle de la dureté de la vie, là-bas bien plus qu'ici. Sans oublier le tit morceau d'égo trip, passage obligé, avec J'innove et sa petite flûte joueuse et entêtante qui allège le beat lourd.
Au milieu de toutes ces considérations pas toujours très gaies (c'est pas bô la réalité, par définition), Pomerium nous offre 2 bols d'air, 2 parenthèses d'excellent accabit : une petite instru un brin oppressante avec l'Interlude, aux violons qui s'énervent et font monter la pression, avec le démarrage fulgurant de la batterie pour lancer une série de scratchs enlevés , et le magnifique exercice de style de l'Ingrédient, à l'instru plus ludique, limite clownesque, et aux textes bien jouissifs pour ce morceau festif qui regroupe tous les points de vue du bédavage : les mains d'abord ("c'est toujours nous qu'on menotte quand tu es puni"), dont la recherche des différents ingrédients annonce les interventions des-dits ingrédient. La feuille tout d'abord ("je combats les fachos chez OCB"), perverse à souhait ("si c'est trop sec prend une chatte plutôt qu'une langue") et bien moqueuse ("t'aurais du me garder à l'oeil, tu fumeras une blague carambar si j'ai pas glissé sous le fauteuil"), le shit, planqué dans le slip, qui s'annonce comme le dernier espoir, la cigarette qui raconte son éventration ("elle m'ouvre à l'aide de son ongle féroce comme un scalpel") pour terminer par le briquet, très imbu de lui-même ("quand je suis plus là c'est le drame, on m'appelle la flamme" "depuis ma naissance j'ai fait des dizaines de poche" "j suis le dernier élément j'suis une pièce maitresse, quand on m'a pas c'est gênant on fouille dans toutes les pièces") et un peu inquiétant... ("je fricote avec le gaz et l'essence, me laisse pas avec un taré dans une forêt sans défense"). un morceau bien jouissif qui aurait mérité d'être le dernier de l'album, histoire de se quitter dans la joie et la bonne humeur.
Car si l'ensemble de l'album est homogène, avec une égalité de niveaux entre les flows, des instrus sobres, sans fioritures inutiles ou spectaculaires, qui nous plonge dans une atmosphère de joie mélancolique, j'émettrais tout de même une tite critique à son sujet : il a 2 tracks en trop. L'édifice 2, qui, bien qu'à la hauteur du premier, n'en est pas moins redondant, et le dernier titre de l'album : J'aime, qui rappelle J'innove avec ses flows énervés, mais n'apporte rien de significatif au reste de l'album, en tout cas accroche moins que le reste.
En tous les cas une bonne surprise à suivre de près et que je vous recommande vivement ! :)




POMERIUM PROD
LP / sorti en 2005

Chronique de Lady Psycho
note : 17/20

01 - Prélude
02 - Zone sacrée
03 - Nuit blanche
04 - Plus la force
05 - 187
06 - L'édifice
07 - J'innove
08 - Interlude
09 - Le sourire aux lèvres
10 - Parce que...
11 - L'ingrédient
12 - L'édifice
13 - J'aime

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